Rendre l’histoire accessible aujourd’hui et à l’avenir
Il y a près de 30 ans, je roulais dans les Prairies, à la dernière étape de ma tournée mondiale L’homme en mouvement. Malgré le temps glacial de ‑30 degrés qui sévissait, j’ai été reçu avec chaleur et enthousiasme partout au Manitoba.
Les années 80 ont marqué le début de la discussion, au Canada, au sujet du potentiel des personnes handicapées ainsi que des obstacles physiques autant que des attitudes s’opposant à sa réalisation. Notre Charte canadienne des droits et libertés avait consacré l’égalité des personnes handicapées, mais celles-ci devaient encore lutter pour des droits de base comme l’accès à des lieux publics.
Ironiquement, à l’époque, le Palais législatif du Manitoba et d’autres immeubles historiques comme les parlements dans nos capitales étaient complètement inaccessibles. De toute évidence, il restait beaucoup à faire pour créer un pays qui soit accessible et inclusif pour tous.
En 2008, j’ai été invité par le premier ministre du Manitoba Gary Doer à l’assemblée législative de la province, pour le dévoilement d’une toute nouvelle rampe à l’entrée principale de l’édifice.
Les améliorations historiques suscitent souvent de la résistance, et l’intention du premier ministre Doer d’installer cette rampe n’avait pas fait exception. Nombreux étaient ceux à juger que la rampe non seulement altérerait l’allure historique de l’édifice, mais en outre serait trop coûteuse. Pour préserver l’intégrité historique, les architectes ont utilisé des pierres provenant de la carrière d’origine pour construire la rampe.
Je suis arrivé à Winnipeg en pleine tempête de neige, et j’ai été étonné de découvrir la rampe complètement à sec. J’ai par la suite appris qu’elle était chauffée. La glace et la neige de l’hiver ne poseraient pas de problème de sécurité. Le coût était relativement minime pour faire honneur aux valeurs de notre pays, et l’investissement en valait bien la peine.
Aujourd’hui, le gouvernement du Manitoba et le même palais législatif évoluent à nouveau. Lorsque le député provincial d’Assiniboia Steven Fletcher est devenu le premier quadriplégique membre du gouvernement du Manitoba, une réalité a éclaté : le palais législatif était accessible pour les visiteurs, mais la chambre de l’assemblée législative n’était pas accessible pour un député en fauteuil roulant.
Le gouvernement du Manitoba est maintenant en voie de trouver une solution à l’obstacle des escaliers menant à la chambre, de sorte que Steven Fletcher puisse rejoindre ses collègues comme tout autre député.
D’après Statistique Canada, 3,8 millions de Canadiens (1 sur 7) ont un handicap. Et avec le vieillissement de la génération du baby-boom, nous pourrions en compter 9 millions (1 personne sur 5) d’ici 2036.
Les normes d’hier sont les obstacles d’aujourd’hui. En 1987, les efforts visaient simplement à donner aux personnes handicapées l’accès à un immeuble. En 2017, nos attentes ne se limitent pas à l’accessibilité, mais englobent l’inclusivité – la possibilité de participer pleinement à tout ce qui se fait dans l’immeuble.
La volonté de préserver le patrimoine ne signifie pas que nous devions compromettre nos valeurs. Pour protéger nos immeubles historiques, nous pouvons faire en sorte qu’ils restent pertinents en les rendant à la fois accessibles et inclusifs aujourd’hui et à l’avenir. Lorsque les personnes handicapées peuvent participer et contribuer comme tout le monde, notre économie, notre culture et notre société, collectivement, en bénéficient.
Nous avons tant à célébrer pour le 150e anniversaire du Canada. Si nous avons en effet bien progressé, nous n’avons pas fini. Continuons sur notre élan et offrons aux Canadiens comme cadeau d’anniversaire un milieu sans obstacles, pour que les personnes handicapées puissent réaliser pleinement leur potentiel.