Arrondissement historique de l’avenue Stephen
Îlot urbain du 100, avenue Stephen (8e Avenue S.-O.) et 7e Avenue S.-O.
Une proposition d’aménagement du plus important paysage urbain d’immeubles de grès contigus à Calgary signifierait une perte d’une ampleur inédite pour le patrimoine bâti de la ville.
Pourquoi est-il important?
L’avenue Stephen (8e Avenue S.-O.) est le cœur commercial historique du centre-ville de Calgary, revêtant une valeur exceptionnelle sur les plans de la culture, de l’architecture et de la vie communautaire. Rue la plus emblématique de Calgary, l’avenue Stephen est un quartier commercial bien préservé. S’y trouvent près de trois douzaines d’immeubles historiques, dont plusieurs construits en grès qui sont de fiers témoins de l’émergence de Calgary comme « ville de grès » après le grand incendie de 1886. L’avenue Stephen est le plus éminent quartier patrimonial de la ville, avec le dernier grand ensemble subsistant d’édifices historiques dans un centre-ville qui a été transformé par la construction de tours de bureaux pendant le boom pétrolier des années 1970.
L’avenue Stephen revêt une valeur profonde et impérissable pour la population de Calgary. Face à l’incessante démolition d’immeubles historiques dans le secteur au cours des années 1970, le gouvernement de l’Alberta et la Ville de Calgary ont agi pour préserver l’identité de l’avenue Stephen. Ils ont désigné comme biens du patrimoine quatre immeubles du milieu et de l’extrémité de l’îlot urbain. Aujourd’hui, il y a de nombreuses désignations provinciales et municipales dans le secteur. Dans les années 1980, un programme public-privé de 10 ans a servi à la réhabilitation de 34 des immeubles patrimoniaux du secteur pour leur donner une nouvelle vocation économique. Des subventions allant jusqu’à 200 000 $ ont été octroyées pour la restauration de façades, et le secteur privé a investi tout autant pour la remise en état de l’intérieur des immeubles.
En 2002, le lieu historique national du Canada de l’avenue Stephen a été désigné par la Commission des lieux et monuments historiques du Canada.
Pourquoi est-il en danger?
Une demande d’utilisation des sols et de permis d’aménagement a été soumise par le promoteur immobilier Triovest, visant l’îlot urbain comprenant l’avenue Stephen (8e Avenue) et la 7e Avenue entre les 1re et 2e Rues S.-O. Le projet, appelé « Stephen Avenue Quarter » comprend une tour de bureaux, deux tours résidentielles (une des plus grandes de Calgary, avec plus de 60 étages), de l’espace commercial et un hôtel. Il y a 17 lieux d’importance patrimoniale touchés par l’aménagement (la plus forte concentration d’immeubles du patrimoine dans un seul îlot urbain du centre-ville), et le plan semble prévoir la démolition de tous sauf un (l’église centrale méthodiste). Il conserverait seulement six façades sur l’avenue Stephen : l’immeuble Norman, l’immeuble Clarence, l’immeuble Tribune, la Banque Molson, Calgary Hardware et le grand magasin de la Baie d’Hudson (1891). Tous seraient réduits à des façades.
Les plans exigeraient l’abrogation de la désignation municipale de cinq biens (l’immeuble Tribune et quatre autres immeubles sur la 7e Avenue), pour faciliter la démolition. Il faudrait aussi l’approbation officielle de la Ville de Calgary pour autoriser la démolition d’un lieu désigné par la municipalité, ainsi que l’approbation officielle de la province pour permettre la démolition d’une ressource historique provinciale (la Banque Molson), pour ne conserver que les façades. L’annulation de désignations sur une telle échelle, si elle se fait, minerait gravement le système de protection légale de biens du patrimoine en Alberta. La majorité des immeubles restants touchés par le projet figurent au répertoire de ressources historiques évaluées de Calgary, signifiant qu’ils méritent une désignation municipale. Fait important, le projet empiéterait sur le lieu historique national de l’avenue Stephen, qui serait aussi compromis.
Que doit-on changer?
Les valeurs patrimoniales des propriétés désignées dans la zone du projet Stephen Avenue Quarter sont bien connues. Toute altération de ces propriétés exigera une approbation officielle du ministre de la Culture de l’Alberta (Jason Yuan, député de Calgary) ou du maire et du conseil municipal de Calgary. Une protection patrimoniale a été accordée à ces propriétés, des décennies plus tôt, dans plusieurs cas, en réponse à d’intenses pressions du public. Leur sort est maintenant entre les mains de ces élus. Bien qu’une désignation patrimoniale ne signifie pas qu’un immeuble doive rester figé dans le temps, l’ampleur de l’intervention, du changement et de la perte qu’entraînerait la proposition dépasse de loin ce que tout citoyen trouverait acceptable pour des ressources du patrimoine d’une importance nationale.
La Fiducie nationale du Canada croit que les villes du Canada ont besoin de politiques et de mesures législatives pour assurer la conservation et la réutilisation d’immeubles existants – une mesure essentielle en réponse à la crise climatique. Le fait de protéger la désignation patrimoniale et de promouvoir la réutilisation et la mise à niveau d’immeubles existants – par opposition à leur démolition pour les remplacer par de nouvelles constructions, fussent-elles écologiques – aurait un effet important dans l’immédiat et à plus long terme en vue d’atteindre les cibles de GES du Canada. On ne saurait trop insister sur l’intérêt à tirer parti de l’énergie intrinsèque des immeubles existants et à éviter les émissions de carbone et autres répercussions environnementales de l’extraction de ressources, de la fabrication de matériaux et de la construction de nouveaux bâtiments. Des politiques favorisant la réutilisation des immeubles encourageraient le secteur public et le secteur privé à exploiter leurs actifs bâtis à titre de forme productive d’action climatique.
Le Canada a aussi besoin de mesures fiscales fédérales pouvant changer la donne, comme l’a fait le crédit fiscal fédéral pour la réhabilitation d’immeubles historiques, aux États-Unis. Ce programme américain a réussi à faire contrepoids à l’avantage de la démolition / construction à neuf. Lancé en 1976, il a suscité 102,64 milliards de dollars d’investissements privés (5 fois la valeur des crédits fiscaux fédéraux accordés). Il a créé plus de 130 000 emplois chaque année, il a préservé 45 383 immeubles historiques, il a permis la création de 172 416 unités de logement abordable, et il a évité d’énormes quantités d’émissions de GES.
Lieu: Calgary, Alberta
Palmarès des 10 sites les plus menacés : 2022
Situation actuelle : Menacé