Église Sainte-Marie: La plus grande église en bois d’Amérique du Nord risque d’être démolie
L’Église catholique Sainte-Marie surplombe le village de Pointe-de-l’Église et l’Université Sainte-Anne (la seule université francophone de la province) dans le sud-ouest de la région « Côtes acadiennes et Yarmouth », en Nouvelle-Écosse. En 2019, après le service religieux la veille de Noël, la grande église en bois, à l’intérieur abondamment ornementé, a fermé ses portes pour la dernière fois. Plusieurs tentatives de collectes de fonds menées par la communauté dans le but de restaurer l’église ont échoué; sa démolition paraît maintenant imminente.
Le bâtiment religieux a été érigé entre 1903 et 1905 par 1 500 bénévoles acadiens catholiques de la région de Pointe-de-l’Église, sous la direction du maître-charpentier Léo Melanson. Il s’agit de la plus grande église en bois d’Amérique du Nord : son clocher mesure 185 pieds (56,4 m) et son design rappelle le style néo-roman français. Quarante tonnes de roches ont été placées à la base du clocher pour remplir la fonction de lest, vu les puissants vents qui soufflent régulièrement sur la baie Sainte-Marie. Plusieurs résidents des environs descendent de familles acadiennes, arrivées dans la région en 1769 en provenance du Massachusetts, après avoir survécu à l’expulsion des Acadiens de la Nouvelle-Écosse en 1755. L’Église Sainte-Marie est la troisième église à avoir été construite sur le site.
Emma Lang, directrice générale de Heritage Trust of Nova Scotia, souligne que le bâtiment raconte l’histoire de la communauté acadienne dans la région de Pointe-de-l’Église; elle était au centre de la vie communautaire. « La perdre serait une tragédie locale, une tragédie provinciale, une tragédie nationale et une tragédie internationale. »
En 2020, à cause d’un déficit de trois millions de dollars en lien avec des réparations (y compris pour le toit qui fuyait), l’archidiocèse catholique a commencé à accepter des offres de parties intéressées à acheter l’Église Sainte-Marie. Peu de temps après, l’archidiocèse est arrivé à un accord avec la Société Édifice Sainte-Marie de La Pointe, constituée de membres de la communauté locale. Cet accord devait permettre au groupe de prendre possession du bâtiment religieux à un prix symbolique afin de s’occuper de sa réhabilitation et de son entretien.
La pandémie de la COVID-19 en 2020 a retardé l’organisation prévue. De plus, elle a entraîné des tensions inflationnistes qui ont rapidement fait doubler les estimations initiales des coûts relatifs aux réparations et aux améliorations du bâtiment. Le travail de la Société a également été entravé quand sa demande de proposition d’une stratégie de collecte de fonds détaillée est restée sans réponse et qu’aucune organisation n’a manifesté d’intérêt pour prendre le monument en charge à long terme. La capacité de la communauté a été mise à l’épreuve encore davantage lorsqu’une autre église historique du diocèse (la grande église de pierre Saint-Bernard, située à 10 km au nord de Pointe-de-l’Église) a été désacralisée et a, elle aussi, fait face à l’éventualité d’une vente ou d’une démolition. Le 8 novembre 2022, la Société a annoncé la fin de ses activités et son démantèlement.
En avril 2023, un étrange revirement de situation a ravivé l’espoir que l’Église Sainte-Marie reprenne vie : un donateur anonyme s’est manifesté, offrant dix millions de dollars pour réparer le monument. Toutefois, en octobre de la même année, les fonds ne s’étaient toujours pas matérialisés et le donateur avait disparu, laissant la communauté de Pointe-de-l’Église désenchantée. En août 2023, l’Église Saint-Bernard a été rachetée de l’archidiocèse par un organisme à but non lucratif, dans le but d’en faire un lieu culturel dynamique et un site clé pour les événements entourant le Congrès mondial acadien 2024. Le 24 novembre 2023, l’Église Sainte-Marie a été désacralisée et mis en vente le 30 janvier 2024. L’avenir de cette extraordinaire construction patrimoniale demeure incertain.